Vacances d'été 2010. Après deux super semaines aux Lanches avec Sabina, Victor, Félix, mes petites soeurs et leurs familles respectives, on part de la maison lundi 16 août, on passe le col du Petit Saint Bernard dans la pluie et la tempête et on roule pour aller en Italie à San Dona où Sabina va encore passer deux semaines chez ses parents.
Bon pour moi évidemment le temps passé à
tourner en rond chez ma belle-mère n'est pas très fun alors je
me suis préparé un petit programme avec plein de trucs à
faire sur la route du retour à Lyon en passant par la Suisse. Jeudi 19
août, 07h00, départ de San Dona. Milan / Chiasso / Lugano / Bellinzona
/ Biasca ça y est me voilà au coeur des montagnes du Tessin. A
gauche c'est la vallée du Mountain
Gravity mais qui commence que samedi, à droite c'est la vallée
de l'Adula (nom de la montagne en italien) / Rheinwaldhorn (nom de la montagne
en allemand), le point culminant du Tessin où j'ai décidé
de monter. 11h30 je suis garé juste après Malvaglia au parking
du petit téléphérique de Dagro. Ben ouais parce qu'on est
est encore qu'à 400 mètres d'altitudes, alors puisque le "filovia"
existe autant s'en servir hein.
Il faut attendre jusqu'à 14h00 la prochaine rotation, je mange un peu
et je boucle mon sac, et là gros problème, je suis en fait très
malheureux d'avoir abandonné Victor et Félix. Pfff a quoi bon
aller encore s'échiner à porter ce gros sac de caillou en caillou,
c'est le sourire de Victor et Félix quand je m'amuse avec eux qui me
fait le plus plaisir ! Quel con je suis d'être parti dès jeudi,
la profonde vallée dont on ne voit même pas les sommets qui dépassent
où je me trouve aurait bien pu attendre un jour ou deux de plus, alors
que mes petits garçons là-bas sans moi que vont-ils devenir??
Je suis en train d'hésiter à faire demi-tour, reprendre la voiture,
refaire la route en sens inverse pour aller les reprendre dans mes bras... Arrff
et puis voilà le téléphérique qui se met en route,
allez merde je suis venu ici il faut assumer maintenant et voilà je me
retrouve 1000 mètres de dénivellée plus haut.
Bon ben allez je prend le chemin en direction du refuge en me disant que si c'est une belle course, demain je rentrerai pour la raconter à Victor et Félix ça me fait un bon espoir. A part ça le chemin est quand même très joli et sacrément bien entretenu : des pierres et des rondins tout le long pour le conforter, le marquage est précis, c'est du travail vraiment bien fait. On passe à côté de plein de petits chalets tous restaurés, quelle belle intégration dans le paysage. Et devant les petits chalets des femmes en bikinis blancs qui se font bronzer les fesses, que de charmes vraiment !
Notez que la vallée a exactement le même profil que la Valpelline l'année dernière pour se rendre au refuge d'Aoste et à la Dent d'hérens : une longue vallée qui remonte d'ouest en est et qui tourne au nord, au bout de laquelle on trouve le refuge appuyé contre le flanc sud-ouest de la montagne : intéressante similitude ! Le chemin est très chouette à marcher, après être sorti de la forêt on croise des vaches.
Chouette chemin mais long chemin... on monte encore et enfin apparaît le refuge, mais il y a une longue boucle à effectuer jusqu'au fond de la vallée pour éviter une profonde rupture de terrain et le chemin monte encore plus haut que le refuge, ahlala mais ça n'en finira donc pas ? Le téléphone sonne, Sabina appelle pour échanger les nouvelles, Victor et Félix se sont bien amusés aujourd'hui et Victor me parle au téléphone, ah me voilà tout réconforté !
19h00 j'arrive finalement à la Capanna Quarnei, altitude 2107 mètres, groupe de gardiens jeunes et très sympas, chaleureuse ambiance, bon repas, deux demi-litres de Panaché, ça va mieux ! Comme je suis le seul à monter demain à l'Adula / Rheinwaldorn j'ai un dortoir pour moi tout seul, quel luxe ! Je m'installe donc avec confort, je me couche tôt et j'ai ainsi le temps de bien dormir et de faire plein de rêves complètement insensés.
Vendredi 20 août, 04h00 réveil, copieux petit-déjeuner et à 04h45 je me mets en route. Une petite heure de marche dans le noir et apparaissent les premières lueurs de l'aube, le chemin qui monte au Passo del Laghetto disparait dans les cailloux mais ça va je m'en sors bien, un dernier petit couloir rocheux dans lequel coule un torrent et me voici au Passo del Laghetto, je suis tout à fait dans l'horaire et en forme, c'est cool. A partir de là j'attaque la montée de l'arête ouest, pas de difficultés particulières, c'est un peu comme monter à Bellecôte. Un peu de gaz à ma droite avec le refuge tout en bas et à ma gauche le glacier qui descend du sommet. Je continue ma progression sur l'arête, il y a juste deux cables à deux endroits pour sécuriser le parcours et j'arrive au petit plateau tout enneigé situé sous le sommet.
Crampons, piolet, j'attaque droit dans la pente (euh, en fait je suis les traces déjà bien marquées!), ça se redresse un peu, puis quelques mètres en terrain mixte et voilà je débouche au sommet ! 09h15, altitude 3402 mètres, une course de petit niveau mais quel beau sommet pourtant ! Et vu comme j'étais fatigué et attristé hier, mon plaisir d'être si bien monté jusque ici est encore plus grand. Il y a une autre cordée de deux personnes montées elles de la Capanna Adula par le glacier. Tout autour de moi plein de vallées et de sommets inconnus à contempler, quelle belle aventure.
Je resterais bien une heure ou deux à me laisser bercer par le soleil et le plaisir d'être au point le plus haut du paysage mais il ne faut pas tarder pour assurer le décollage en parapente, alors hop je prends le chemin de la descente par le glacier, mon itinéraire des deux jours effectue ainsi une grande boucle autour de la montagne. A mi-glacier je croise une autre cordée de trois personnes, le relief conviendrait bien à l'installation d'un déco, du plat suivi d'une pente moyennement douce, mais je sens le vent un peu cul, ça veut dire courir sur la neige dure avec des crampons et une voile pas sûr du tout de gonfler, ah c'est dommage je préfère continuer à descendre.
Et puis c'est la fin du glacier et voici les grands pierriers, ici même pas la peine d'y penser, l'heure tourne je vais me dépêcher de rejoindre les premières pentes d'herbes pour assurer un bon déco. L'heure tourne encore et j'arrive à la fin des pierriers, mvouaisbof les pentes d'herbes c'est pas encore ça, allez je m'installe sur une des premières qui semble convenir, je déplie la voile... mais non c'est trop raide la voile glisse pas moyen de la maintenir en place, ah je me suis vraiment fait avoir dans ma hâte à décoller dès les premières pentes d'herbes, me voici obligé de tout replier, je reprends la descente et quand le relief devient plus accueillant... c'est le ciel qui ne l'est plus, déjà plein de cumulus qui se sont formés le long des pentes et qui grossissent à vue d'oeil, ahlala ça sent l'échec tout ça !
Je ne suis plus loin de la Capanna Adula alors je finis la descente à pied jusque là, je mange une assiette le temps d'observer le ciel, allez c'est mort les nuages enflent de partout et recouvrent maintenant tout le relief alors qu'on est à peine en début d'après-midi, ça c'est une journée qui va se finir avec de beaux et gros orages. Hier pendant la montée au refuge les quelques bribes de nuages s'étaient facilement disloquées en fin d'après-midi, pour demain c'est du grand beau toute la journée de prévu, mais aujourd'hui c'est pas pareil c'est plus fort et violent. J'avais vaguement regardé la météo suisse sur Internet à San Dona avant de partir et c'était bien prévu ainsi, mais la marge d'imprécision me semblait si grande que ça justifiait bien de tenter sa chance...
J'ai déjà descendu 1000 mètres depuis le
sommet, il en reste néanmoins encore 2000 jusqu'en bas de la vallée
! Je pars doucement sur le chemin pour me ménager les genoux et ça
dure ainsi une bonne partie de l'après-midi, c'est sûr je ne vais
pas vite mais je n'ai pas mal non plus aux genoux, ce sont plutôt les
épaules et le dos qui en ont marre de porter le sac. La forêt est
très belle, je vois un écureuil, j'atteinds les premières
maisons à partir desquelles le chemin laisse la place à une piste
de 4x4, tiens en voilà justement un de 4x4, hop on me prend en stop à
l'arrière jusqu'à Dangio où je continue avec le car postal
pour retourner jusqu'à la Filovia où j'ai laissé la voiture.
Pendant ce temps les nuages gris qui encerclent les sommets s'assombrissent
encore plus, même si je n'ai pas volé pas de regret donc d'avoir
fait ma balade sur jeudi/vendredi plutôt que vendredi/samedi, parce que
si j'étais maintenant dans la montée de la Capanna Quarnei dans
l'orage je n'aurais pas pu repérer le chemin du lendemain, c'est pourtant
très important.
La vraie question maintenant c'est : est-ce que je retourne à San Dona
? Au fond de moi-même ce que je désire le plus c'est retrouver
Victor et Félix. Mais encore se taper une millième fois l'autoroute
de Milan à Venise quelle galère. Alors je roule jusqu'à
l'hôtel un peu après Ambri où j'avais déjà
dormi l'année dernière : s'ils ont de la place j'y reste, sinon
je rentre à San Dona. Evidemment... évidemment il y a de la place
et me voilà inscrit pour la nuit, adieu mes garçons, mais dormir
une bonne nuit c'est quand même raisonnablement ce que j'ai de mieux à
faire.
Samedi 21 août je prends un très gros petit déjeuner et
je me rends à l'aéroport d'Ambri, le Mountain
Gravity se met en place. Il y a un Caravan, un Beech et l'Antonov à
tranche arrière, pour sauter c'est nickel, par contre personne de Fly
your body c'est dommage. Mais allons faire voler l'Expert que me prête
Pascal Martinez ! Un premier saut pour se remettre les plumes en place, et puis
deux, trois, quatre... la sensation de vol au-dessus des montagnes et en descendant
le long du relief est quand même fabuleuse. L'Adula / Rheinwaldhorn se
distingue nettement dans le ciel, ça me fait un bon point de repère
c'est cool.
Encore un cinquième et un sixième saut en compagnie
d'un autre wingsuiteur, c'est très chouette. Le dernier saut de la journée
s'effectue au coucher du soleil, je tire en même temps que le soleil se
trouve sur l'horizon et la voile s'ouvre pendant que je tombe dans le trou sombre
de la vallée : une rigolote sensation ! L'organisation du Mountain
Gravity fait bien les choses, il y a ensuite à boire et à
manger pour la soirée, encore une fois je m'interroge "est-ce que
je retourne voir Victor et Félix" ? Mais faut arrêter d'être
bête, je vais les retrouver dès le vendredi de la semaine suivante,
ça ne justifie pas autant de route pour tant revenir en arrière
le dernier jour des vacances. Et puis après avoir marché et sauté
en montagne je n'ai toujours pas volé en parapente, en regardant mes
cartes je repère une petite rando facile qui me permettrait de ne pas
rentrer bredouille de parapente, allez c'est une seule fois dans l'année
que Sabina me laisse aussi longtemps de liberté il faut en profiter.
La nuit est déjà bien avancée, une Carrea 4S vient faire
des runs sur la piste de l'aéroport mais moi je pars avec ma Logan Break
direction la montagne. Je roule depuis cinq minutes lorsque soudainement je
réalise que j'ai oublié mon parachute dans la hangar du pliage
! Demi-tour, le temps de récupérer le parachute la Carrera 4S
est venue se garer à côté de ma Logan, ma voiture qui est
deux fois plus haute semble très protectrice, visiblement la Carrera
4S est venu se coller à elle pour se sentir bien... Mais il faut repartir,
je passe le Col du Saint Gotthard désert dans la nuit, je descends sur
Andermatt, ah là c'est plus animé on s'amuse bien et je reprends
aussitôt la montée de l'Oberalppass où j'arrive vers minuit
et demi. Monter une tente dans la nuit pour la démonter au petit matin
c'est trop galère alors je vais faire ce que j'avais toujours souhaité
pouvoir faire en voiture: juste rabattre un siège pour avoir la place
de s'allonger entièrement à l'arrière. C'est un peu juste
mais ça y va, et voilà dodo !
Dimanche 22 août. J'ai finalement si bien dormi que j'ai laissé passé le réveil de 05h00, le temps d'enfin émerger du sac de couchage le soleil n'est déjà plus très loin. Je lappe vite une gorgée de lait et je pars direction le vallon du Piz Ravetsch. Ca serait un sommet intéressant à monter dans l'optique d'un déco montagne mais pas en partant si tard, là l'objectif c'est seulement de monter aux petits sommets au-dessus de l'Oberalppass. Il y a justement un chemin qui passe par le lac de Tuma, voler au-dessus d'un lac de montagne pour le retour ça me convient parfaitement.
Et voilà j'arrive à la pointe 2684 mètres même pas nommée sur la carte mais qu'importe, le paysage est très beau et l'endroit convient parfaitement pour installer mon aile.Go je décolle, je passe devant la Badushütte où les randonneurs prennent leur petit-déjeuner attablés sur la terrasse et j'arrive au lac de Tuma que je survole de pas très haut mais tout va bien. Au sol il y a bien sûr l'ombre de mon parapente mais aussi son image qui se reflète à la surface de l'eau du lac, quelle vision magique !
Pour rejoindre l'Oberalppass je suis ensuite un peu trop court
alors je continue à me laisser glisser dans la vallée et je pose
au village de Tschamut. (Après c'était le golf de Selva, ça
aurait fait désordre..) Il y a un arrêt du Glacier Express pour
remonter à l'Oberalppass mais je n'ai pas de sous, et puis c'est maintenant
le dernier jour des vacances ça me fait toujours plaisir de marcher,
allez hop encore un peu d'effort et je rejoins la voiture-camping-car-magasin-de-matériel-de-montagne
au col. Je m'offre un coca pour fêter l'achèvement de ces quelques
jours en Suisse et je prends la route du retour par le col de la Furka, la vallée
du Rhône, Lausanne, Genève et Lyon où j'arrive en fin d'après
midi.
Cinq jours de travail et le vendredi je prends l'avion pour retrouver Sabina,
Victor et Félix au mariage de la soeur de Sabina en Allemagne, Mon Dieu
comme mes petits garçons ont grandis ! Il était temps que je revienne
! Et puis on fait le vol du retour tous ensemble, un bon moment avec Victor
qui peut maintenant comprendre ce que c'est que voler en avion. Félix
préfère lui dormir tout le long dans les bras de sa maman !